Mes Amelhens

Terre d'espérance
Dessin de Max Siffredi

André Ackermann

Aux Amelhens :
Milou et Marguerite ont recueilli des clandestins à partir de la fin de la guerre d’Espagne. Il est passé chez eux des hommes de toutes les nationalités et en premier lieu des Allemands, internés au retour d’Espagne puis évadés, et Milou évoquait souvent celui qui ne savait pas un mot de français, et qui resta six jours aux Amelhens, d’où il repartit avec les meilleurs vêtements que Milou avait pu trouver, et quelque argent prélevé sur les très modestes resssources de la famille. Il y eut aussi des Espagnols, des Italiens, un Polonais et, bien entendu, de Français, vivant dans la clandestinité.

Pour nous, et plus spécialement pour moi, Milou et Marguerite, qui n’avaient pas eu d’enfants, furent des parents attentifs et affectueux. Milou se proclamait mon père, mais il agissait comme un grand frère qui aurait bien aimé m’entraîner dans quelques frasques derrière le dos de Marguerite ; mais c’est un genre de risque que je ne pouvais pas prendre.

Marguerite, soignait la cuisine et me réservait toujours les meilleurs morceaux. Elle me maternait et c’est tout juste, quand je sortais, si elle ne vérifiait pas que j’avais les oreilles propres.

Ils ont tous les deux pris des risques inouïs, et si Milou était à son affaire, je voyais bien que Marguerite n’était pas toujours très rassurée. Mais jamais, jamais elle n’a fait une observation qui aurait pu paraître donner à penser qu’elle avait peur, ou que cette vie périlleuse lui était devenue insupportable.
C’est grâce à l’abnégation de tels amis, comme aussi les Vigne, les Maura, les Marc, les Rat, les Couderc, les Martin et tant d’autres, que la Résistance a pu exister et jouer le rôle qui fut le sien.

Après la Libération on a honoré les résistants, pas tous d’ailleurs, on a aussi honoré des résistants de la dernière heure; mais on a oublié ceux qui l’ont rendue possible, et ont, pour cela, couru des risques aussi grands.

 

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